Locus Solus X Contrechamps

Œuvre VR avec instruments live de Raphaël Raccuia et Nicolas Carrel
Musique co-composée avec Valentine Collet (hautbois) et Noëlle Reymond (contrebasse)
Durée : 13' 

Créée dans l’environnement de synthèse sonore PatchXR, la pièce immersive proposée par Raphaël Raccuia et Nicolas Carrel invite l’auditeur·ice à un voyage ascensionnel dans un monde peuplé de machines célibataires. Afin de mettre en tension l’univers high-tech de la réalité virtuelle et de maintenir à distance respectable et critique les promesses de métavers, le duo use délibérément de sonorités analogiques, créant ainsi une composition à la charge émotive et intime. À chaque étage du parcours, la proposition musicale évolue, réactivée par la présence live d’un duo contrebasse/hautbois, dans un échange dynamique entre performance et environnement numérique.

L'œuvre s'inscrit dans une proposition plus large de l'Ensemble Contrechamps, nommée également Locus Solus, comprenant les pièces VR et musicales de Sachie Kobayashi (Rêverie - Trans-Instrumentalism) et de André Décosterd / Arnaud Parel (Vertiges)
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© Morgane Meyer
© Morgane Meyer

Geneva International Film Festival


LOCUS SOLUS x CONTRECHAMPS x GIFF
3 créations VR avec instruments live.
30 représentations pour une jauge de 16 personnes avec casque VR individuel.

Du 31 octobre au 9 novembre 2025.

LOCUS SOLUS, 13'
Raphaël Raccuia et Nicolas Carrel
Musique co-composée avec Valentine Collet et Noëlle Reymond

RÊVERIE - TRANS-INSTRUMENTALISM, 12'
Sachie Kobayashi

VERTIGES, 12'
André Décosterd et Arnaud Parel

DISTRIBUTION
Valentine Collet: hautbois
Noëlle Reymond: contrebasse
Simon Aeschimann: guitare (sur Rêverie et Vertiges)
Christophe Egea: ingénieur du son
Benjamin Ducrot: ingénieur du son
Matthieu Baumann: régie lumière
Loïc Rivoalan: régie lumière

En coproduction avec le GIFF

Teasers: Locus Solus, 2025

Teaser pour les 3 pièces :lien ici

Entretien descriptif


Pourquoi Locus Solus ? 

« Locus Solus » signifie « lieu unique » en latin et ce titre correspond assez bien à l’expérience que nous proposons : il s’agit d’abord, pour les spectateurs et les spectatrices, de se confronter à un espace tridimensionnel singulier. Cet espace, qui semble infini car sans horizon, est en réalité un espace imaginaire clos, qui fonctionne selon ses propres lois, selon son propre modus operandi. Bien qu’on y demeure simple observateur ou observatrice, on comprend assez rapidement qu’il est tout entier orienté vers la production de sons, de mots et de musique. C’est une machine de Tinguely qui voudrait prendre la parole et devenir musicienne. 

La référence à l’œuvre éponyme de Raymond Roussel n’est pas fortuite. Dans ce livre à énigmes, le personnage principal Martial Canterel fait visiter sa propriété en présentant une série de « machines » complexes, des inventions absurdes et saugrenues qui aspirent toutes à créer, à se transformer, à devenir autre. Ce sont bien ces « machines désirantes » que l’on peut qualifier de « célibataires » que nous retrouvons dans notre expérience. Elles sont « célibataires » car elles sont autonomes, autosuffisantes et pourtant en quête de sens : elles cherchent à reproduire des gestes musicaux de manière obsessionnelle et mécanique, comme pour exister, comme pour entrer en dialogue. À la différence du livre, la visite que nous proposons se fait de manière ascensionnelle, comme dans un étrange ascenseur imaginaire. 

Quelle est l’expérience du public ? 

Pour l’édition 2025 du GIFF (Geneva International Film Festival), nous avons souhaité, avec l’Ensemble Contrechamps et les compositeurices Sachie Kobayashi et André Décosterd, accueillir une quinzaine de participant·e·s par session tout au long du festival. Nous leur proposons de vivre trois expériences sonores en réalité virtuelle, dont Locus Solus fait partie. La singularité de ces trois propositions réside dans la rencontre entre immersion virtuelle et performance musicale en direct : le public assiste à un véritable concert où trois musicien·ne·s de l’Ensemble Contrechamps jouent en interaction avec l’univers sonore et virtuel qui se trouve à l’intérieur du casque, selon des modalités propres à chaque œuvre. 

Dans Locus Solus, chaque participant·e se retrouve plongé·e dans un univers imaginaire habité par des machines sonores, qu’iel découvre au fil d’une ascension lente et hypnotique. Cette montée en apesanteur invite à la contemplation et à l’écoute. Le jeu de Noëlle Reymond à la contrebasse et de Valentine Collet au hautbois, à la fois présentes dans la salle et perceptibles par fragments à travers des sons préenregistrés et spatialisés dans le monde virtuel, fait glisser l'expérience vers la performance live, en établissant un dialogue direct avec l'univers virtuel proposé. Ce dispositif permet également de brouiller les pistes : on ne sait plus distinguer les sons issus de ces machines sonores dans cet espace virtuel de ceux, bien réels, des instruments joués live.  
Il était important pour nous de déjouer les attentes habituellement associées à la réalité virtuelle : par exemple, plutôt que de rechercher la sensation forte, la vitesse ou le vertige, nous avons privilégié la lenteur, le confort et la disponibilité d’écoute. Le choix d’un univers sonore plus acoustique et analogique s'inscrit dans cette même démarche. C'était aussi, pour nous, une manière de tenir à distance respectable et critique les visions publicitaires portées par les GAFAM dans leur promesse de métavers.

Qu’entend-on dans Locus Solus ?

La pièce a été pensée pour et réalisée dans Patchworld, un environnement de programmation musicale en réalité virtuelle souvent décrit comme un "synthétiseur virtuel". La composition repose sur des sons instrumentaux enregistrés ou joués en direct. Dans le premier cas, les sons sont déclenchés par le code selon différents paramètres, règles temporelles ou éléments de hasard : il s'agit donc d'une musique en partie algorithmique, complémentaire à l'action des instrumentistes. La spécificité de Patchworld, en comparaison à d’autres environnements de programmation en mode graphique (Pure Data, Max/MSP) ou en code (CSound, SuperCollider) est que la pièce s’écrit directement dans le même espace que celui qui accueille le public, avec un dispositif technique plus ou moins avoué. Le code devient visible, il apparaît sous forme de machines, de mécanismes et de connexions entre ces éléments. Ainsi, les spectateurices sont plongées non seulement dans l’univers visuel et sonore que nous avons préparé, mais également dans le mécanisme intrinsèque de l’œuvre. Cela rejoint l'idée des « machines célibataires » de Marcel Duchamp et n'est pas sans évoquer la visite du domaine de Martial Canterel citée plus haut. 

En introduisant la poésie sonore et des sons instrumentaux dans le monde de Locus Solus, nous avons voulu nous départir de l’expectative triviale d'y entendre des sons apparentés à ce que l'on pourrait appeler le fun de la tech. Les interactions entre les musiciennes et le patch (le programme) sont l'autre composante probablement inattendue de l'expérience.

Auriez-vous une machine à nous décrire en exemple ?

Au début de l’expérience, la première machine forme des mots de deux ou plusieurs syllabes chuchotées. Alors que le·la spectateurice s’élève lentement dans les airs, un réseau de sphère disposées en arborescence se met en action, recevant à intervalles réguliers une impulsion se propageant du sommet vers le base. A chaque intersection celle-ci peut prendre un chemin ou l'autre, vers la gauche ou vers la droite, selon un processus de Bernoulli (un espace de probabilités). Au départ, l'impulsion ne part que d'un côté, formant inexorablement le même mot. Mais peu à peu, la probabilité de bifurcation augmente, jusqu'à atteindre la parité, formant ainsi une multitude de mots différents, dont le sens reste toutefois à déterminer. Chaque casque joue ses propre dés, si bien qu'il n'y ait jamais deux expériences identiques, et on peut entendre en filigrane les résultats des autres instances en cours de la pièce.
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